Isis
ENFIN une histoire intéressante.
Après des albums qui traînaient en longueur et rallongeaient cette histoire de Mages Rouges… ENFIN quelque chose de potable.
Pour commencer, je citerai un message de l'utilisateur du forume nommé "marque" : "Dorison réussit le pari de rester cohérent avec les albums précédents, en se débarrassant de toutes les scories, voire fardeaux qui encombraient l’intrigue depuis plusieurs épisodes, tout en redonnant une réelle épaisseurs aux personnages, dans une histoire pleine d’action". Ce message résume parfaitement mon point de vue.
Un des détails qui me manquait dans les derniers tomes, c’était des personnages avec du relief. Dorison réussit à s’approprier toute la ribambelle pondue par Sente et à en faire quelque chose de bien. Ici, tous les personnages ont enfin leur petit moment de gloire… même des secondaires tels que Alad ou Bohr ont droit à des lignes de dialogue qui les définissent et dépeignent quelque peu leurs motivations. Magon, enfin, ressemble à quelque chose. Il aime Aniel, il a des sentiments, il existe.
Tous les personnages, ici, ont finit par exister.
On donne enfin une explication concernant le personnage de Salouma, en montrant qu’il y a des raisons derrière son comportement erratique. Après des années à se balader de tome en tome sans rien comprendre à ce qui se passait, Dorison nous offre des explications sur sa personnalité.
Mais il y avait d’autres personnages, trop de personnages, et il fallait faire du nettoyage. Et même là, Dorison réussit à que ce nettoyage ait du sens et aille plus loin que celui du simple peloton d’exécution. Le calife, sa femme et le Wazir sont exécutés dans une scène terrible, mais émotionnelle, qui nous rappelle qu’il s’agit là d’êtres humains. Et de plus, la scène permet de nous dépeindre ce qu’est devenu Aniel.
Et Thorgal, bon sang, Thorgal qui revient enfin ! Pour mieux en parler, je citerai l'utilisatrice du forum nommée "Elleana" : "Je trouve que Dorison a bien mieux compris la saga Thorgal que son prédécesseur Sente, qui, à mon sens, a terriblement gâché la série. Dorison reprend les thèmes forts que j’apprécie : un Thorgal au cœur de l’action, dépassé par les évènements extérieurs mais s’efforçant courageusement de respecter ses principes, une aventure familiale avec une relation père-fils compliquée mais pleine d’amour, un rythme rapide avec des dialogues réduits au strict nécessaire. J’aime le fait que Thorgal ne soit pas une marionnette sans personnalité comme dans le précédent album, mais qu’il réfléchisse, cherche des solutions, essaie de comprendre les motivations de son fils, fasse des propositions pleine de bon sens."
Ainsi Thorgal, que l’on avait perdu, revit enfin après une léthargie trop longue. Il revient à ses fondamentaux, la famille. Et sa relation avec Aniel, au centre de cet album, est très intéressante.
J’ai d’ailleurs bien aimé le parallèle avec « L’île des enfants perdus ». Je trouve que c’est une excellente idée de lier ainsi les 2 cycles. Au lieu de les lier par le scénario (ce qui peut perdre les lecteurs qui ne lisent qu’un seul cycle), on les lie par leurs motifs, leur enjeux, leur symbolique. Les parents d’Aniel sont confrontés à leur façon de concevoir la paternité. Chacun des deux est face a un enfant qui éveille en eux des émotions.
Le parallèle entre Magon et Osian me semble aussi bien particulier. Ils éprouvent de l’amour pour l’enfant qui est à leur charge. Et ils se sacrifient tout les deux pour cet enfant. Mais alors qu’Osian se sacrifie uniquement pour sauver Erwin, Magon le fait pour transformer Aniel en machine à tuer. Et ironiquement, Osian n’aura pas réussi à sauver Erwin, alors que Aniel, lui, a survécu.
En définitive, ce n'est pas le meilleur album de la série Thorgal, non. Mais le scénario de cet album est un travail d'orfèvre : Dorison reprend une trame scénaristique dont il n'a pas écrit le début et s'efforce de travailler avec tous les éléments qu'il a entre les mains pour proposer un scénario cohérent et des personnages forts. Et pour ce tour de force, je lui met la note maximale. Non, ce n'est pas le meilleur Thorgal, mais il mérite une reconnaissance.